Personnes âgées, technologies numériques et rupture du lien social:
risques de l’exclusion ou leurres de l’inclusion?
DOI:
https://doi.org/10.33167/2184-0644.CPP2020.VVIN2/pp.79-97Resumo
Quand on est âgé, en France en 2019, il ne suffit pas d’être dans la rue pour être exclu voire se sentir exclu d’une société qui, avec sa révolution numérique imposée aux citoyens, tourne de plus en plus le dos à certaines composante du corps social. En effet, face à la numérisation à outrance prônée par les instances dirigeantes et autres technocrates qui se propage à la vitesse d’un Tsunami, les personnes âgées, souvent des femmes seules et/ou veuves appartenant aux catégories défavorisées de la société, généralement peu ou pas instruites et encore moins au fait de la gestion des pratiques informatiques minimales, se retrouvent déjà ou vont se retrouver sous peu, abandonnées sur le bord du chemin de ce type de modernisation qui n’a rien d’inclusive. Quelques acteurs de proximité du champ social et médico-social, le défenseur des Droits tirent déjà la sonnette d’alarme et font remonter les discours d’angoisse de ces personnes âgées qui ne savent plus comment faire face à la déshumanisation des services publics : « moi, j’ai 78 ans, j’ai une tout petite retraite, pas d’ordinateur et de toutes façons, je sais pas faire. Alors c’est embêtant maintenant parce que je dois me faire aider et je ne connais pas de gens qui peuvent m’aider. Il va falloir que je me rende sur place. C’est loin de chez moi, il faut attendre longtemps et je suis fatiguée. Et puis faut être certaine qu’il y aura quelqu’un ! ». Conscient de cette dynamique d’exclusion en marche et parce que nous recueillons depuis des mois les signes de ce désarrois qu’aggravent l’isolement et la solitude, notre démarche de recherche-action vise à terme à mettre en oeuvre des contre-actions dont le but est de contrecarrer les effets néfastes induits de la transition numérique sur la vie sociale des personnes âgées tout en cherchant à les libérer de l’enfermement négatif dans lequel leur incapacité à gérer pour elles-mêmes cette transition les a conduits insidieusement. C’est cette altération des existences humaines des plus fragiles qui se trouvent au cœur de notre démarche de chercheurs-praticiens comme de nos actions; ceci tel un faible rempart contre l’inhumanité du système qui se met en place inexorablement lorsqu’un robot vous signale : «vous avez dépassé la date critique (deadline en anglais et dans ce mot, il y a le mot « mort ») de dépôt de votre dossier sur le portail lambda, l’administration ne peut plus rien pour vous ». Il y a là, n’en doutons pas, un champ d’action immédiat pour les politiques publiques notamment en matière de lutte contre l’exclusion numérique des citoyens âgés. Pour e moment et comme toujours, en France, les opérateurs associatifs et humanitaires pallient avec leurs faibles moyens, à cette absence des pouvoirs publics mais une telle situation ne saurait durer sans affecter à terme, gravement l’équilibre sociétal et les principes moraux de justice sociale comme l’accès aux droits pour tous.
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